Un salarié qui s'approprie sans autorisation quelque chose (somme d'argent, matériel de l'entreprise, données, etc.) qui appartient à quelqu'un d'autre (l'entreprise, un client de l'entreprise, un autre salarié de l'entreprise, etc.) commet un vol.
Le Code pénal définit le vol comme la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui. (1) Le salarié encourt donc une sanction pénale. Il encourt également une sanction disciplinaire qui peut aller jusqu'à remettre en cause sa place dans l'entreprise.
Un employeur peut-il systématiquement licencier le salarié qui commet un vol au sein de l'entreprise ?
Quel type de sanction disciplinaire pour un vol dans l'entreprise ?
Les sanctions envisageables
Si l'entreprise possède un règlement intérieur (document obligatoirement mis en place dans l'entreprise ou l'établissement employant au moins 50 salariés), elle doit se conformer à ce que prévoit l'échelle des sanctions intégrée dans le document. Il n'est alors pas possible de prononcer une sanction qui ne figure pas dans l'échelle des sanctions.
Les sanctions possibles sont :
- le blâme ;
- l'avertissement ;
- la mise à pied disciplinaire ;
- la rétrogradation ;
- la mutation ;
- le licenciement pour faute simple ;
- le licenciement pour faute grave ;
- le licenciement pour faute lourde.
Une mise à pied conservatoire peut précéder une mesure de licenciement.
La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. En cas de vol, le licenciement pour faute grave est souvent la sanction retenue par l'employeur.
La faute lourde suppose que le salarié ait eu l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise. Cela est difficile à démontrer donc le licenciement pour faute lourde est rarement utilisé.
Après avoir rassemblé des preuves, l'employeur peut sanctionner
Une fois l'élément intentionnel caractérisé et les preuves de la matérialité du vol rassemblées (le vol doit en principe relever de la vie professionnelle et il n'est pas possible de sanctionner sur la base de simples soupçons), l'employeur peut envisager de sanctionner disciplinairement le salarié.
Une règle prime : la sanction disciplinaire doit toujours être proportionnée à la gravité de la faute commise.
Plusieurs facteurs doivent permettre à l'employeur d'apprécier la gravité de la faute : l'ancienneté, les fonctions occupées, le caractère isolé ou non de l'écart professionnel, le préjudice subi par l'entreprise, les circonstances du vol, etc.
Il n'y a pas de réponse type. Chaque situation est unique et ne justifiera pas nécessairement un licenciement.
A compter du jour où il a connaissance du fait fautif, l'employeur dispose d'un délai de 2 mois pour sanctionner le salarié. Ce délai est suspendu si le fait fautif fait l'objet de poursuites pénales dans le même délai. (2)
Exemples de cas ayant conduit à un licenciement pour faute simple, faute grave ou lourde
La chambre sociale de la Cour de cassation est parfois amenée à traiter des cas de licenciements pour vol. La jurisprudence est donc importante et permet de donner des exemples de cas de vols qui ont été considérés comme constitutifs d'une faute.
Faute simple
Vol d'une pizza par une caissière n'ayant fait l'objet d'aucune autre remarque au cours de ses 7 ans d'ancienneté. (3)
Faute grave
Vol commis par un salarié au préjudice d'un client de l'employeur, alors même que l'objet soustrait est de faible valeur. (4)
Constitue un vol le fait de dissimuler à l'employeur de manière volontaire et persistante un trop-perçu de rémunération et refuser de restituer ce trop-perçu. (5)
Faute lourde
Vol d'argent dans la caisse de l'entreprise à plusieurs reprises. (6)
Comment se passe le licenciement ?
La procédure : convocation, entretien préalable, lettre de licenciement
Si l'employeur choisit de licencier le salarié, alors il devra respecter la procédure du licenciement pour motif personnel, qui est la suivante :
- convocation du salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise en main propre contre décharge ;
- entretien préalable au licenciement au moins 5 jours après réception de la convocation par le salarié ;
- notification du licenciement au moins 2 jours après l'entretien.
En cas de licenciement pour faute grave ou pour faute lourde, le salarié n'effectue pas de préavis.
L'employeur qui engage dans le même temps des poursuites pénales contre le salarié peut procéder au licenciement sans attendre le jugement de la juridiction pénale.
Quels sont les droits du salarié licencié ? Indemnités, chômage...
En cas de licenciement pour faute simple, le salarié bénéficie d'une indemnité de licenciement.
A l'inverse, aucune indemnité de licenciement n'est versée au salarié licencié pour faute grave ou pour faute lourde.
Concernant les droits au chômage, aucun type de licenciement ne peut priver le salarié du droit à percevoir une allocation de retour à l'emploi (ARE) s'il remplit les conditions pour en bénéficier.
Le salarié peut contester son licenciement
Le salarié qui estime que son licenciement pour vol est abusif et ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse peut saisir le Conseil de prud'hommes, dans un délai de 12 mois à compter de la notification de la rupture du contrat de travail.
Plusieurs risques peuvent être encourus par l'employeur : annulation du licenciement, réintégration, versement d'une indemnité, versement de dommages et intérêts, etc.
Sources :
- (1) Article 311-1 du Code pénal
- (2) Article L. 1332-4 du Code du travail
- (3) Cass. Soc., 29 janvier 2008, n°06-43.501
- (4) Cass. Soc., 16 janvier 2017, n°04-47.051
- (5) Cass. Soc., 11 septembre 2019, n°18-19.522
- (6) Cass. Soc., 27 octobre 1998, n°96-43.302
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