- C'est quoi une remarque sexiste et quels sont les comportements sexistes ?
- Quel est un exemple de comportement sexiste ?
- Quelles sont les obligations de l'employeur en matière d'agissement sexiste ?
- Quelle est la sanction pour un agissement sexiste ?
- Quelles sont les nouveautés jurisprudentielles apportés par l'arrêt du 12 juin 2024 n° 23-14.292 ?
Dans un récent arrêt de jurisprudence, la Cour de cassation apporte quelques précisions concernant les sanctions applicables à un salarié ayant tenu des propos sexistes à l'égard de ses collègues de travail, et ce même si ce genre de comportement avait auparavant été toléré par l'employeur.
C'est quoi une remarque sexiste et quels sont les comportements sexistes ?
Le Code du travail définit les agissements sexistes comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant (1).
Cette définition est entrée dans le code du travail dans le but de combattre le sexisme dit ordinaire auquel peuvent être confrontés les salariés. Il s'agit de l’ensemble des attitudes, propos et comportements fondés sur des stéréotypes de sexe, qui sont directement ou indirectement dirigés contre une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe et qui, bien qu’en apparence anodins, ont pour objet ou pour effet, de façon consciente ou inconsciente, de les délégitimer et de les inférioriser, de façon insidieuse voire bienveillante, et d’entraîner une altération de leur santé physique ou mentale (2).
Quel est un exemple de comportement sexiste ?
Il peut s'agir à titre d'exemple des remarques et propos dégradants à caractère sexiste suivants :
- «Ah c’est vrai, qu'on ne peut pas compter sur toi le mercredi »
- «Elles sont chiantes, c’est des nanas » (3).
Ou des comportements suivants, notamment envers les femmes :
- Ne pas être convoquée à une réunion ;
- Ne pas être écoutée ;
- Ne pas pouvoir prendre la parole etc.
Quelles sont les obligations de l'employeur en matière d'agissement sexiste ?
L’obligation de prévention d'agissement sexiste s’intègre dans l’obligation générale de l’employeur de sécurité.
En effet, ce dernier a l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (4).
Ces mesures comprennent :
- Des actions de prévention des risques professionnels;
- Des actions d'information et de formation ;
- La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
Pour ce faire, l’employeur doit planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes(5).
Quelle est la sanction pour un agissement sexiste ?
Ainsi, il apparaît que l'employeur est tenu de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits d'agissement sexiste mais également, d'y mettre un terme et de les sanctionner.
Dès lors, un comportement sexiste peut engendrer une sanction "proportionnée" prévue par le règlement intérieur.
Il peut s'agir à titre d'exemple des sanctions suivantes : un avertissement, une mise à pied disciplinaire, un licenciement, etc.
Quelles sont les nouveautés jurisprudentielles apportés par l'arrêt du 12 juin 2024 n° 23-14.292 ?
Dans cette récente affaire, un salarié est licencié pour faute par son employeur qui lui reproche, d’avoir tenu à l’égard de plusieurs de ses collègues de sexe féminin des propos injurieux, dégradants et humiliants.
Le salarié fait valoir ses droits en justice. La cour d'appel affirme que :
- Si le salarié a bien commis une faute en tenant des propos graveleux et salaces :
- Le licenciement est toutefois sans cause réelle et sérieuse, puisque le salarié avait déjà tenu des propos similaires par le passé qui avaient été tolérés par l'employeur.
L’employeur saisit à son tour la Cour de cassation, non content du jugement rendu par la cour d'appel au motif que son obligation de sécurité qui lui imposait de faire cesser de tels agissements dégradants à connotation sexuelle et attentatoire à la dignité des salariés et son pouvoir de direction, qui l'autorisait à sanctionner la réitération des faits par le salarié, malgré sa tolérance passée.
La Cour de cassation affirme alors que dans un cadre général, des agissements fautifs réitérés du salarié, lorsqu’ils ont été longtemps tolérés par l’employeur ne peuvent plus constituer une faute grave (6).
Toutefois, cette position ne doit pas pour être systématique et notamment dans le cas d'harcèlement sexuel ou d'agissement sexiste.
Ainsi, la Cour de cassation juge que :
- Le salarié avait tenu envers deux de ses collègues, de manière répétée, des propos à connotation sexuelle, insultants et dégradants ;
- Ce qui était de nature à caractériser, quelle qu'ait pu être l'attitude antérieure de l'employeur tenu à une obligation de sécurité en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, un comportement fautif constitutif d'une cause réelle et sérieuse fondant le licenciement décidé par l'employeur.
Sources :
(1) Article L1142-2-1 du Code du Travail ;
(2) Le sexisme dans le monde du travail entre déni et réalité - Rapport du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes n°2015-01 publié le 6 mars 2015
(3) Cour d’appel de Paris du 18 décembre 2012 ; S11/10654
(4) Article L4121-1 du Code du Travail ;
(5) Article L4121-2 du Code du Travail ;
(6) Cass. soc. chambre sociale, 12-7-2022 n° 20-22.857
(7) Cass. soc. chambre sociale, 12-06- 2024, n° 23-14.292
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