La résiliation judiciaire est un mode de rupture du contrat de travail particulier devant respecter différents points nécessaires à sa validité.
La jurisprudence de mars 2022 permet à ce titre de préciser les contours de cette résiliation judiciaire, notamment en ce qui concerne la régularisation de la situation litigieuse par l'employeur.
Qu'est-ce que la résiliation judiciaire ?
La résiliation judiciaire est un mode de rupture particulier. En effet, dans le cas d'une résiliation judiciaire, la rupture est à l'initiative du salarié en raison des manquements reprochés à l'employeur.
Qui peut formuler une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ?
Principe
La demande de résiliation judiciaire pourra seulement être formulée par le salarié, l'employeur étant irrecevable à cette procédure (Cass ; soc ; 20 décembre 2006, n° 05-45.210).
Dans cette hypothèse, le salarié devra saisir le conseil de prud'hommes et continuera à travailler jusqu'au prononcé de la décision par les juges.
Exception
Il est ici nécessaire de préciser qu'une exception pourra être faite lorsqu'il sera question d'un contrat d'apprentissage dans la mesure où l'apprenti aurait commis une faute grave, et ce, dans un délai de 45 jours à compter du début du contrat.
C'est notamment l'article L. 6222-18 du code du travail qui prévoit que « le contrat peut être rompu par l'une ou l'autre des parties jusqu'à l'échéance des quarante-cinq premiers jours consécutifs ou non. »
Quels sont les motifs pouvant être invoqués par le salarié justifiant une résiliation judiciaire ?
Différents motifs pourront être invoqués par le salarié pour justifier sa demande de résiliation judiciaire. Ces motifs pourront notamment être les suivants, à savoir :
- discrimination ;
- suppression d'un véhicule professionnel qui permettait au salarié de venir travailler (Cass ; soc ; 10 mai 2006, n° 05-42.210) ;
- propos dégradants tenus envers un salarié et qui portent atteinte à sa dignité ;
- dévalorisation d'un salarié, discrédit jeté sur un employé et l'affectant personnellement tout en portant atteinte à sa fonction, son autorité et son image (Cass ; soc ; 7 juillet 2009, n° 08-40.034).
Il est toutefois nécessaire de préciser que durant toute la procédure prud'homale, tout autre moyen de rupture pourra mis en œuvre, tel que : le licenciement, la rupture conventionnelle, ou encore la démission.
Distinction entre la résiliation judiciaire et la prise d'acte de la rupture
Pour rappel, la résiliation judiciaire est une rupture différente de la prise d'acte de la rupture du contrat. Ces deux types de rupture devront donc être différenciés en termes de conséquences sur la relation contractuelle notamment.
Ainsi, si une demande de résiliation judiciaire est rejetée par les juges, alors le contrat de travail continue de produire ses effets et la relation contractuelle perdure entre les parties.
Toutefois, en cas d'acceptation de cette résiliation judiciaire par les juges, celle-ci produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Lors d'une résiliation judiciaire l'employeur peut-il régulariser la situation avant le prononcé de la décision du juge ?
Oui, dans le cas où les juges constatent une régularisation de la situation au jour de la décision, la demande de résiliation judiciaire pourra être rejetée.
C'est notamment ce qui a été jugé dans un arrêt rendu par la chambre sociale le 29 janvier 2014, n° 12-24.951.
Dans cette affaire les juges ont statué sur le fait que les manquements avaient été régularisés.
La Cour de cassation avait donc pu juger que la Cour d'appel avait estimé « que les manquements imputés par la salariée à l'employeur, dont elle a constaté l'entière régularisation au jour de sa décision, n'étaient pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat de travail ».
Il est toutefois nécessaire de préciser qu'une résiliation judiciaire reste justifiée si la régularisation de la situation est intervenue après le licenciement du salarié.
De ce fait, la régularisation des manquements postérieurs au licenciement ne justifie pas la fin des manquements reprochés à l'employeur, dans la mesure où ces manquements n'ont pas été résolus durant la relation contractuelle avec le salarié.
En effet, dans une telle hypothèse, la régularisation étant intervenue après le licenciement du salarié, n'avait pas pu rendre possible la poursuite de la relation contractuelle entre les parties.
De nouvelles précisions jurisprudentielles concernant la résiliation judiciaire du contrat
La chambre sociale de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 2 mars 2022, n° 20-14.099 relatif à la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié.
Dans cette affaire récente, il était question de faits ayant été reprochés à l'employeur, suite à une résiliation judiciaire. S'en est suivi le licenciement du salarié en question avant que le juge n'ait statué sur la demande de résiliation judiciaire du salarié concerné.
La Cour de cassation a ainsi décidé que les juges devaient avant tout vérifier si la demande de résiliation judiciaire était justifiée.
Ainsi, la Cour précise que les juges doivent apprécier dans une telle situation, si les manquements de l'employeur étaient de nature à empêcher la poursuite de la relation contractuelle en prenant en compte la régularisation survenue jusqu'à la date du licenciement.
Cet arrêt met donc en exergue la possibilité pour l'employeur de procéder à la régularisation de la situation litigieuse avant que le juge ne se prononce sur la demande du salarié.
Toutefois, ne sera pas pris en compte, la régularisation intervenue après le licenciement dans le cas d'une action en résiliation judiciaire. Une démarche mis en œuvre trop tardivement par l'employeur ne pourra donc lui être favorable.
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