Comment se calculent les indemnités de licenciement pour inaptitude ?

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Par Laurie GOMARI 12 juin 2024
Sommaire

Lorsque la procédure de licenciement pour inaptitude arrive à terme, le salarié doit bénéficier de différentes indemnités pouvant s'avérer complexes à calculer.

Le présent article permet de connaître toutes les indemnités auxquelles le salarié a droit ainsi que les modes de calcul qui s'y rattachent.

Un salarié peut être licencié pour motif d'inaptitude lorsqu'un médecin du travail a établi un avis d'inaptitude concernant son poste de travail. Une procédure spécifique doit alors être appliquée par l'employeur afin de licencier ce dernier.

Toutes les spécificités du licenciement pour inaptitude réunies en 1 seul dossier
Icone dossier rougeToutes les spécificités du licenciement pour inaptitude réunies en 1 seul dossier

Comment être déclaré inapte au travail ?

Lorsque le médecin du travail constate qu’aucune mesure d’aménagement n’est possible sur le poste du salarié, l’employeur est en droit de licencier son salarié en respectant la procédure de licenciement pour inaptitude

L’avis d’inaptitude permet d'attester de l'inaptitude physique ou mentale d'un salarié. Cet avis d'inaptitude est un document qui doit être rédigé avec clarté et précision. En effet, lorsque le médecin du travail constate qu’aucune mesure d’aménagement, de transformation ou encore d’adaptation n’est possible sur le poste de travail du salarié, et que l’état de santé de celui-ci justifie un changement de poste, le salarié pourra être déclaré inapte à son poste de travail.

Ainsi, la procédure de licenciement ne peut commencer qu'à partir de l'émission de cet avis d'inaptitude.

Rupture conventionnelle ou licenciement pour inaptitude ?

Il peut parfois être compliqué de faire un choix entre une rupture conventionnelle et un licenciement pour inaptitude. La première chose à savoir est qu'il est tout à faire possible de passer par une rupture conventionnelle pour mettre fin au contrat de travail d'un salarié au lieu de procéder à un licenciement pour inaptitude. 

Dans le premier cas, (rupture conventionnelle), les deux parties doivent être d'accord sur ce mode de rupture et en définir les modalités de rupture (date de sortie des effectifs, montant de l'indemnité, etc,.). La principale différence entre ces deux ruptures est qu'en cas de licenciement pour inaptitude professionnel, le salarié doit en principe toucher le double de l'indemnité conventionnel de licenciement. A cela, le licenciement pour inaptitude permet au salarié de bénéficier d'une plus grande protection dans la mesure où il ne pourra être licencié qu'en cas d'impossibilité de reclassement. Pour rappel, l'employeur peut être soumis à un obligation de proposition de reclassement. 

S'il s'agit toutefois d'un licenciement pour inaptitude d'origine non professionnel, l'indemnité ne sera pas doublée. 

Enfin, la procédure ainsi que les étapes à respecter ne sont pas les mêmes. Le licenciement pour inaptitude doit obligatoirement faire intervenir un médecin du travail pour que l'inaptitude soit reconnue, une recherche de reclassement s'il y a lieu (proposition de reclasement), etc,. 

Il est aussi nécessaire de se fier à sa convention collective pour obtenir toutes les informations concernant l'indemnité de fin contrat et les règles applicables aux modalités de fin de contrat.

Quelles sont les indemnités perçues en cas de licenciement pour inaptitude ?

Une fois la procédure de licenciement pour inaptitude effectuée, vient le calcul du montant de l’indemnité de licenciement pour le salarié. Il devra être distingué deux situations : celle de l'inaptitude non professionnelle et celle de l'inaptitude professionnelle.

Rupture du CDI

Inaptitude d'origine professionnelle

Dans l'hypothèse d'un licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle, l'employeur devra faire bénéficier le salarié en CDI d'une indemnité au moins égale à l'indemnité de licenciement, excepté en cas de dispositions conventionnelles plus favorables pour le salarié.

Le principe est celui posé par l'article L. 1234-9 du code du travail qui dispose que : "le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement."

L'employeur doit donc verser a minima l'indemnité légale de licenciement en plus d'une indemnité compensatrice de congés payés, dans l'hypothèse où ceux-ci n'auraient pas été pris par le salarié.

Une précision est nécessaire ici concernant la possibilité qui est donnée aux partenaires sociaux de négocier des dispositions conventionnelles plus favorables pour le salarié. Tel sera notamment le cas de l'ancienneté du salarié.

En effet, les dispositions légales et plus précisément celles du code du travail, font mention de l'obligation d'une ancienneté de 8 mois a minima, alors qu'une convention collective peut prévoir l'absence de condition d'ancienneté. Toutefois, cette condition d'ancienneté ne pourra pas être supérieure à ce que prévoit la loi.

Aucune condition d'ancienneté n'est requise pour le salarié dans la mesure où il s'agit d'une inaptitude d'origine professionnelle.

Dans le cas d'un licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle, le salarié devra bénéficier d'une indemnité qui sera majorée. En effet, celui-ci devra bénéficier des indemnités suivantes :

  • Une indemnité spéciale de licenciement ;
  • Une indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis ;

Le montant de cette indemnité représente le salaire intégral que le salarié aurait perçu s'il avait travaillé durant ce préavis ;

  • Une indemnité compensatrice de congés payés si ceux-ci n'ont pas été pris par le salarié.

Rupture anticipée du CDD

Inaptitude d'origine non professionnelle

Lorsqu'il sera question d'une rupture pour inaptitude du salarié en CDD motivé par une inaptitude non professionnelle, celui-ci devra bénéficier des indemnités suivantes :

  • Une indemnité qui ne peut être inférieure au montant de l'indemnité légale de licenciement ;
  • Une indemnité compensatrice de congés payés acquis et non pris s'il y a lieu ;
  • Une indemnité de précarité à hauteur de 10 % de la rémunération brute totale, excepté si l'objet du CDD (contrat aidé, saisonnier…) ne le prévoit pas.

Inaptitude d'origine professionnelle

Dans le cas d'une rupture pour inaptitude d'origine professionnelle du CDD, celui-ci bénéficiera des indemnités suivantes :

  • Une indemnité spéciale de licenciement ;
  • Une indemnité de précarité à hauteur de 10 % de la rémunération brute totale, excepté si l'objet du CDD (contrat aidé, saisonnier…) ne le prévoit pas ;
  • Une indemnité compensatrice de congés payés acquis et pris s'il y a lieu.
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Comment calculer les indemnités de licenciement pour inaptitude professionnelle ou non professionnelle ?

Inaptitude d'origine non professionnelle

Pour être en mesure de procéder au calcul des indemnités de licenciement dans le cas d'une inaptitude non professionnelle, l’employeur doit prendre en compte les points mentionnés ci-dessous.

Prise en compte de l'ancienneté du salarié

Comme rappelé précédemment, le code du travail précise que le salarié doit avoir a minima 8 mois d'ancienneté en cas d'inaptitude non professionnelle.

La prise en compte de cette ancienneté débute à compter de son premier jour de travail jusqu'à la date de la rupture effective de son contrat de travail. Précision faite du fait que plusieurs périodes de suspension du contrat de travail doivent être prises en compte pour le calcul de l'ancienneté du salarié.

Périodes de suspension prises en compte dans le calcul de l'ancienneté

L'employeur doit prendre en compte les périodes de suspension suivantes, à savoir :

  • Les congés pour raisons familiales (congé parental d'éducation à temps partiel, congé maternité ou d'adoption, congé de présence parentale, congé de proche aidant, congé de solidarité familiale…) ;
  • L'arrêt de travail lié à un accident ou une maladie professionnelle ;
  • Le congé lié à la formation professionnelle (CSE, congé mutualiste de formation…) ;
  • Les congés payés annuels ;
  • Les autres congés : congé de solidarité internationale, stage de fin d'étude supérieur à 2 mois, projet de transition professionnelle, temps partiel pour création d'entreprise ou reprise d'entreprise, réserve opérationnelle…).

Périodes de suspension exclues du calcul de l'ancienneté

L'employeur devra prendre soin d'exclure les périodes suivantes dans le calcul de l'ancienneté du salarié, à savoir :

  • L'accident de travail et la maladie non professionnelle ;
  • La mise à pied du salarié ;
  • L'activité partielle ;
  • La grève ;
  • Les autres congés : congé pour création ou reprise d'entreprise, congé paternité, congé sans solde, congé sabbatique, etc.

Mode de calcul de l'indemnité légale de licenciement

Le code du travail prévoit de calculer l'indemnité légale minimale de licenciement comme suit :

  • 1/4 de mois de salaire par année d'ancienneté : pour les 10 premières années ;
  • 1/3 de mois de salaire par année d'ancienneté : à compter de la 11ème année.

En cas d'année incomplète : l'indemnité légale de licenciement devra être calculée proportionnellement au nombre de mois complets du salarié.

Pour rappel, une convention collective peut prévoir des dispositions plus favorables concernant cette indemnité. Il en sera de même dans le cas d'un accord d'entreprise, d'un usage ou de dispositions insérées au sein du contrat de travail. Dans ce cas, l'employeur devra prendre en compte les mesures les plus favorables financièrement pour le salarié.

Calcul de l'indemnité de licenciement pour inaptitude non professionnelle

Inaptitude d'origine professionnelle

Mode calcul de l'indemnité spéciale de licenciement

Selon le montant le plus avantageux pour le salarié et peu important son ancienneté, celui-ci bénéficie d'une indemnité spéciale de licenciement dont le montant sera soit égal :

  • Au double de l'indemnité légale de licenciement ;
  • A l'indemnité conventionnelle de licenciement non doublée, si celle-ci est expressément prévue par des dispositions conventionnelles.

Cette indemnité spéciale sera calculée sur la base du salaire moyen des 3 derniers mois que le salarié aurait perçu s'il avait "continué à travailler au poste qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail provoquée par l'accident du travail ou la maladie professionnelle"..

Cette notion de salaire comprend aussi les primes, les avantages en nature, les gratifications et indemnités.

Toutefois, cette indemnité spéciale de licenciement ne sera pas versée aux salariés dans les situations suivantes, à savoir :

  • Des aptitudes avec réserves ;

Dans cette hypothèse, la jurisprudence considère que l'aptitude assorties de réserves n'équivaut pas à une inaptitude. De ce fait, aucun licenciement ne pourra être engagé à l'encontre du salarié, et l'employeur devra le maintenir à son poste en respectant les indications du médecin. Le cas échéant, l'employeur devra procéder à un aménagement du poste de travail et se référer aux indications du médecin du travail.

  • Le cas de refus abusif de proposition de reclassement par un salarié inapte ou apte ;
  • L'accident de trajet.
Calcul de l'indemnité de licenciement pour inaptitude professionnelle Ne faites plus d’erreur dans vos calculs d’indemnités de licenciement pour inaptitude
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Quel est le salaire de référence pour calculer l’indemnité de licenciement ?

Inaptitude d'origine non professionnelle

Concernant le salaire de référence à prendre en compte dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude pour procéder au calcul de cette indemnité, il devra être utilisé la formule la plus avantageuse pour le salarié, soit :

  • 1/3 du salaire versé durant les 3 derniers mois ;

Précision faite du fait que les primes et gratifications exceptionnelles ou annuelles devront être prises en compte en proportion du temps de travail effectif réalisé. Dans l'hypothèse d'une prime annuelle perçue par le salarié, il devra être ajouté 1/12ème de cette prime à chacun des 3 derniers mois de salaire de référence.

  • Moyenne mensuelles des 12 derniers mois précédant le licenciement, ou une moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois qui précédent le licenciement (dans l'hypothèse où le salarié aurait un temps de présence inférieur à 12 mois au total).

Enfin, si le salarié s'est trouvé à un certain moment en arrêt maladie durant les derniers mois, son salaire de référence à prendre en compte sera celui des 12 ou des 3 derniers mois précédant l'arrêt de travail.

Inaptitude d'origine professionnelle

La notion de salaire est définie par : le taux personnel, les primes, les avantages de toutes natures, les indemnités ainsi que les gratifications composant le revenu.

Le salaire de référence sera ici le même que dans le cas d'une inaptitude non professionnelle (12 derniers mois ou 3 derniers mois précédant l'arrêt de travail selon la formule la plus avantageuse).

Combien de temps pour obtenir un licenciement pour inaptitude ?

A compter du 1er RDV avec le médecin du travail, les délais varient en fonction de plusieurs facteurs. Les délais suivants pourront ainsi être retrouvés : 

  • 15 jours : pour que le médecin du travail puisse potentiellement effectuer un 2ème examen médical pour pouvoir obtenir les informations complémentaires qu'il juge nécessaires à sa prise de décision ; 
  • 1 mois : durant lequel l'employeur doit proposer au salarié des postes de reclassement (Si avis d'inaptitude il y avec recommandations de reclassement) ;
  • 5 jours ouvrables : au titre de la convocation du salarié avant le déroulement de l'entretien préalable de licenciement ;
  • 2 jours ouvrables : minimum suivant la date prévue de l'entretien préalable au licenciement

Il est nécessaire de préciser ici que les délais seront allongés pour les salariés protégés. En effet, pour ces salariés, une procédure spécifique devra être respectée avec l'inspection du travail. Leur autorisation sera rendue nécessaire.

Calcul du salaire de référence en cas de licenciement pour inaptitude

Le salarié doit-il respecter un préavis en cas de licenciement pour inaptitude ?

Que ce soit dans l'hypothèse d'un licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle ou non professionnelle, le salarié n'a aucun délai de préavis à respecter. En effet, cela se justifie notamment par la nature du licenciement et l'urgence de la situation, dans la mesure où le salarié a un état de santé qui le contraint à interrompre son activité professionnelle.

Ainsi, la durée du préavis non réalisée sera prise en compte pour la détermination du calcul de l'indemnité légale de licenciement.

L'employeur n'aura donc pas l'obligation de procéder au versement d'une indemnité compensatrice de préavis, excepté toutefois si des dispositions conventionnelles le prévoient ou dans le cas d'un licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle.

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L’indemnité de licenciement se calcule t-elle en brut ou net ?

Le code du travail précise que "les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail" (article L. 1234-9 du code du travail).

De ce fait, l'indemnité légale de licenciement devra être calculée à partir des salaires bruts précédant le licenciement.

Quels sont les avantages d'un licenciement pour inaptitude ?

L'avantage notable en cas de licenciement pour inaptitude professionnelle est que le salarié perçoit le double de l'indemnité conventionnelle de licenciement. Ce type de licenciement permet aussi de bénéficier d'une protection accrue dû à l'intervention du médecin du travail notamment en raison de l'état de santé du salarié. 

Il n'y aura toutefois aucune différence au niveau du montant des indemnités des allocations chômage. 

Existe t-il un simulateur pour calculer l'indemnité de licenciement ?

Oui, le gouvernement a mis en place un simulateur permettant de calculer l'indemnité légale de licenciement du salarié. Ce simulateur a été mis en place sur le Code du travail numérique.

Quel revenu après un licenciement pour inaptitude ?

Dans la mesure où le licenciement pour inaptitude fait partie des conditions permettant l'ouverture des droits au chômage, le salarié licencié pourra en bénéficier. En effet, au même titre qu'un licenciement pour faute lourde, faute grave, cause réelle et sérieuse ou qu'une rupture conventionnelle, le licenciement pour inaptitude est considéré comme une perte d'emploi involontaire. 

Ainsi, lorsqu'un salarié est déclaré inapte au travail il bénéficie en principe de l'allocation chômage calculée en fonction de ses précédents revenus. 

Le montant de l'ARE (Allocation d'Aide au Retour à l'Emploi) versé par Pôle emploi (nouvellement nommé France Travail) est calculée à partir du SJR (Salaire Journalier de Référence). Par ailleurs, des différés d'indemnisation peuvent intervenir en fonction des situations. 

Pour plus d'information vous pouvez vous référer au téléchagement de notre dossier complet sur cette thématique "Bénéficier de l'allocation chômage".

L’indemnité légale de licenciement est-elle exonérée de cotisations sociales ?

En termes de cotisations, l'indemnité de licenciement est exonérée dans la fraction inférieure à 82 272 euros et selon les trois montants ci-dessous pour l'année 2022 :

  • Montant total de l'indemnité légale de licenciement ;
  • 50 % du montant de l'indemnité perçue ;
  • 2 fois le montant de la rémunération brute annuelle perçue l'année précédente.

Pour rappel, cette indemnité sera exonérée d'impôt sur le revenu, sous réserve du respect de certaines conditions.

Comment calculer le solde de tout compte pour inaptitude ?

Le principe du solde de tout compte est qu'il doit reprendre l'inventaire des sommes dues au salarié au moment de son départ de l'entreprise. Ce reçu devra être détaillé et reprendre en principe et s'il y a lieu les élements suivants, à savoir :

  • Le restant du salaire du mois en cours ;
  • L'indemnité compensatrice de congés payés ;
  • Les éventuelles primes ;
  • L'indemnité de rupture ;
  • L'épargne salariale ;
  • L'indemnité compensatrice de préavis .

Saisir les Prud'hommes après un licenciement pour inaptitude ?

Le salarié licencié a la possibilité de saisir le Conseil des Prud'hommes dans un certain délai dès lors qu'il estime qu'un litige existe sur la rupture de son contrat de travail. Le délai à respecter varie en fonction de la nature du conflit.

Dans le cas où l'action porte effectivement sur la rupture du contrat de travail, le demandeur (salarié) aura 12 mois pour saisir le CPH.

Photo : Pixabay